• Alors que le sommet de Cancun sur le climat approche a grand pas, le Giec doit retrouver une credibilite. Depuis le debut de l'annee, le groupe d'experts sur le climat a fait l'objet de pas moins de 6 rapports. Le dernier en date, commande par l'ONU et rendu en debut de semaine, valide ses travaux mais preconise une reforme en profondeur. L'avis d'un des contributeurs du Giec, d'Herve Le Treut*, climatologue, directeur de l'Institut Pierre Simon Laplace et membre de l'Academie des sciences.
    Le rapport du conseil inter-academique estime que le Giec doit proceder a de « profondes reformes ». Cela vous semble-t-il aussi necessaire ?
    Herve Le Treut. En fait le rapport a d’abord valide pour l’essentiel la demarche du Giec et les reformes demandees concernent le management du groupe, la facon dont il est gere. La  finalite du Giec, les conclusions de ses precedents rapports, le principe meme consistant a demander a des scientifiques internationaux de faire un rapport sur le changement climatique, rien de tout cela n'est remis en cause. Par contre, vu les enjeux, il y a un probleme d’adequation du Giec aux attentes de plus en plus fortes en termes de qualite et de professionnalisme. Le Giec a commence en 1988 avec une organisation relativement informelle. Il n'y a pas tres longtemps, seulement 5 personnes travaillaient de facon permanente au secretariat du Giec. Maintenant, il y en a dix. Cela reste donc une toute petite structure par rapport aux enjeux et il est forcement delicat pour elle de communiquer face a des mises en causes ou a une utilisation erronee de ses resultats, mais aussi de verifier que tout est parfait quant au respect des differentes procedures de revision, etc.
    Quelles sont donc les pistes qui vous semblent les plus pertinentes ?
    Ce qui est d’abord propose c’est un renforcement de l’organisation du Giec, ce qui est positif, car cela correspond au fait que l’on a change d’epoque. C'est aussi une exigence de transparence plus grande, en explicitant mieux tous les criteres de nomination des auteurs, et leur  legitimite a participer aux travaux du Giec. Une autre suggestion qui me parait tres utile, que j'ai lue dans le rapport, c’est la notification ecrite des prises de positions des representants des Etats, lors de la procedure de recherche de consensus, au moment de l'adoption du resume destine aux decideurs. Des experts gouvernementaux (qui sont toujours des scientifiques) approuvent deja ligne a ligne ce resume. Mais un rapport ecrit a l'avance peut permettre de mieux structurer les contre-expertises nationales  par rapport a l'expertise internationale telle qu'elle est organisee au GIEC. Toutes ces suggestions importantes peuvent avoir un impact positif. Mais il y a  un probleme de calendrier: par exemple le processus de nomination pour le prochain rapport est deja effectue …
    Le renforcement du role des review editors est aussi mis en avant.

    Quel est exactement leur role ?
    Justement, je m’etais propose comme review editor pour le prochain rapport et je crois que mon travail va etre augmente ! Jusqu’a present les review editors avaient un role relativement limite de verification generale du respect des procedures. Le texte de chaque rapport est soumis a une triple revue. Il est compose une premiere fois, les gens font des critiques, on repond, on corrige, il y a des nouvelles critiques, etc. Les review editors sont la pour verifier que l’on a vraiment repondu aux questions, que l’on s’est vraiment soucie des critiques exprimees. Or, dans le dernier rapport, il y a eu un nombre vraiment exceptionnel de remarques (90 000, ndlr). Ce sont donc des heures et des heures de travail, la nuit, pour des gens qui sont benevoles. Il faut aussi savoir que les auteurs sont submerges de remarques parfois futiles, car certaines personnes utilisent ces commentaires comme certains les amendements a l’Assemblee…Ce que propose le comite inter-academique, c’est donc de renforcer le role (et j'espere le nombre) des review editors (actuellement, il y en a deux par chapitre)  et, ensuite, qu’ils redigent un premier rapport ecrit de synthese des commentaires, en les classant en plusieurs categories : les remarques auxquelles ont a pas besoin de repondre de maniere detaillees jusqu’a celles qui sont fondamentales…C’est maintenant a l’Assemblee pleniere, qui se reunira en octobre, de mettre tout cela en musique et de prendre en compte ces suggestions.
    Effectivement, les attentes sont tres fortes envers  le Giec, organe scientifique…Est-il arme pour faire face a l’ampleur politique et mediatique qu’a pris le sujet du changement climatique ? Notamment en termes de communication ?
    Les attentes sont devenues enormes a partir du deuxieme rapport, mais surtout aux Etats-Unis. En France, pendant longtemps, le Giec etait presque inconnu… Aujourd’hui, quand les auteurs renvoient leurs textes, ils ont enormement de pression, de peur d’avoir laisse filtrer des erreurs. Et c'est de moins en moins acceptable de devoir elaborer un texte de cette importance avec des moyens aussi reduits…Car il faut souligner que le niveau de qualite demande est exceptionnel ; on a parle de trois erreurs peut-etre sur un rapport de 3 000 pages… Pour la communication, c’est un point qui est aborde dans le rapport inter-academique en disant qu’il faut la renforcer, mais sans etre tres specifique. C’est un probleme delicat car l’expertise scientifique doit etre rigoureuse. Or, si elle est rigoureuse, elle est difficile a expliquer. Pour etre comprise, elle doit etre simplifiee. Et on a vu que dans les debats on retournait parfois cette simplification de la communication comme une faute : il y a souvent confusion entre simplification pedagogique et sous-estimation des difficultes scientifiques…Globalement, je pense que la situation est sans issue s'il n'y a pas un certain lien de confiance entre les scientifiques et les gens qui veulent les ecouter.
    Une confiance qui a ete mise a mal par la vague climato-sceptique…
    Mise a mal ou revelee: en tout, c’est pour cela qu’il faut donner des garanties. Il faut aussi bien positionner cette notion d'expertise. Dans la science du climat, il y a des questions factuelles, sur lesquelles la science peut se positionner - ou pas, car parfois elle n’a pas les reponses. Dans la critique "climato-sceptique", il y a eu des remarques factuellement fausses,?et d’autres, portant par exemple sur la maniere de mesurer l'importance des perturbations climatiques a venir, ou sur les enjeux sociaux, qui meritent d'etre ecoutees et prises en compte. Il faut egalement pouvoir cadrer les differents aspects du debat: strictement scientifiques ou concernant l'interaction avec les decideurs politiques. Tout cela doit se faire avec methode.
    L’une des attaques portees contre le Giec cette annee, venait du fait que le groupe avait pris en compte un rapport du WWF. Rappelons que le Giec ne produit pas de travaux scientifiques mais dresse plutot un etat de l’art sur les sciences climatiques, le rendant dependant des travaux des autres…Manque-t-on aujourd’hui de travaux dans certaines disciplines ou regions du monde ?
    Oui bien sur il y a des regions vulnerables, en Afrique par exemple, ou certains risques climatiques potentiels sont peu mis en avant; tout simplement parce qu’il n’y a pas assez d’etudes qui ont ete faites…Quand on fait des panels regionaux ou l’on manque de travaux scientifiques et que, par ailleurs, on a des ONG qui font des travaux de conservations, de  recueil d’un certain savoir, la question est de savoir si on oublie ces contributions ou si on les prend en compte ? Pour ma part, je pense que compte tenu du contexte, il faut privilegier des regles strictes qui ne pretent pas a controverses. Mais c’est un probleme complexe. Dans la controverse sur l’Himalaya il y avait ce probleme de documentation a partir du WWF mais il y avait aussi ce chiffre absurde – le fait que les glaciers allaient disparaitre dans 30 ans- qui a ete maintenu… La on peut imaginer que ces coquilles, avec plus de relecture, puissent etre reduites au maximum.
    Faudrait-il donc creer des Giec regionaux ?
    Je n’y suis pas favorable car pour moi, la force du Giec tient avant tout a sa structure internationale. Deja on le voit pour les panels regionaux, certaines personnes  se connaissent tres bien et les processus de nomination sont plus delicats. La dimension internationale est necessaire par rapport aux enjeux, et c'est aussi une certaine garantie d'objectivite.
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    Le rapport du conseil inter-academique
    Chargee le 15 mai dernier par le secretaire general de l’ONU, Ban Ki-Moon d’enqueter « sur les procedures et methodes » du Giec, le conseil inter-academique a rendu ses conclusions le 30 aout. Si « globalement les procedures d’evaluations du Giec ont ete un succes et servent bien les evaluations menees par les experts » et que les evaluations elles-memes « ont permis de sensibiliser le public aux changements climatiques et ont conduit les decideurs a envisager des options politiques pour y repondre », le groupe a besoin de proceder a des « reformes fondamentales », notamment dans l’organisation de la structure permanente. Le rapport preconise la creation d’un comite executif comprenant des scientifiques exterieurs au Giec voire des membres de la societe civile ainsi que la nomination d’un directeur general a la tete de son secretariat pour gerer les operations au quotidien et s’exprimer au nom de l’organisation. L’actuel secretaire, Rajendra Pachauri, fait l’objet de nombreuses critiques  pour avoir soutenu les erreurs du Giec mais aussi pour sa double casquette de directeur d’un institut de recherche sur l’energie et le climat en Inde et l’origine de ses revenus. Le prochain rapport, auquel collaboreront 831 experts (contre 559 en 2004) est attendu en 2014.
    *Nouveau climat sur la terre, Herve Le Treut, Flammarion, 2009
    Changement climatique: les savoirs et les possibles, de Jerome Chappellaz, Olivier Godard, Sylvestre Huet et Herve le Treut, editions La ville brule, 2010
    <http://rechauffement-climatique.novethic.fr/environnement-le-changement-climatique/changement_climatique/les_avis_des_experts/herve_le_treut_il_y_probleme_adequati


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  • LEMONDE | 04.09.10 |

    L'accord de Copenhague de décembre prévoyait un déblocage rapide par les pays riches de 30 milliards de dollars (23,34 milliards d'euros) d'ici à 2012, et l'instauration d'un fonds vert pour le climat (green climate fund) fournissant 100 milliards de dollars par an à partir de 2020.
    La Conférence sur le climat de Cancun, au Mexique, début décembre, pourrait déboucher sur la création d'un "fonds vert", susceptible de financer l'adaptation au changement climatique dans les pays pauvres. Selon le ministre suisse de l'environnement, Moritz Leuenberger, "un consensus règne sur la nécessité d'un financement à long terme dans le domaine du climat".
    M. Leuenberger concluait une réunion informelle d'une cinquantaine de pays qui s'est tenue à Genève les 2 et 3 septembre. Organisée par la Suisse et le Mexique, la rencontre visait à faire avancer les discussions sur le financement, une question-clé pour débloquer la négociation climatique.
    L'accord de Copenhague de décembre prévoyait un déblocage rapide par les pays riches de 30 milliards de dollars (23,34 milliards d'euros) d'ici à 2012, et l'instauration d'un fonds vert pour le climat (green climate fund) fournissant 100 milliards de dollars par an à partir de 2020.
    La discussion à Genève a porté sur la façon dont ce fonds pourrait fonctionner et sur son articulation avec ceux qui existent : fonds pour l'environnement mondial ; fonds spécial pour les changements climatiques et fonds pour les pays les moins avancés. A quoi s'ajoutent des fonds d'investissement de la Banque mondiale. Mais, comme l'a indiqué un participant, "le problème n'est pas d'avoir beaucoup de vaches, mais d'avoir du lait".
    Quelles seraient les sources de financement possibles ? La question a été abordée au cours de la réunion avec des réponses diverses : nouvelles taxes ? Utilisation des mécanismes de marché du carbone ? Participation du secteur privé ?, etc. Quelques pays, comme la Bolivie, insistent pour que le fonds soit essentiellement alimenté par de l'argent public.

    Transparence de l'argent
    Cette réflexion relève, quoi qu'il en soit, du Groupe consultatif de haut niveau sur le financement de la lutte contre le changement climatique, instauré par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. Ce groupe doit rendre son rapport en novembre.
    La bonne atmosphère des discussions de Genève permet d'envisager une avancée à Cancun : "On est en train de passer de l'idée d'un accord global à l'idée d'accords ponctuels, constate Brice Lalonde, ambassadeur de France pour le climat. Ces derniers pourraient être "balancés", c'est-à-dire qu'un accord partiel sur tel point serait équilibré par un accord dans un autre domaine." Un accord sur le fonds vert, plutôt demandé par les pays du Sud, serait par exemple "balancé" par un texte sur le respect des engagements de réductions des émissions de CO2, plutôt demandé par les pays du Nord.
    Reste la question de la transparence de l'argent déjà mis sur la table. "Les pays du Nord affichent 30 milliards d'engagement, dit Romain Benicchio, d'Oxfam, mais ces fonds sont-ils vraiment nouveaux ?"

    Hervé Kempf


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  • Des représentants de haut niveau de 46 pays et de l'Union européenne se sont réunis jeudi et vendredi à Genève pour un échange informel sur le financement dans le domaine du climat.
    Le ministre suisse de l'environnement Moritz Leuenberger et la ministre mexicaine des Affaires étrangères Patricia Espinosa, qui ont dirigé les discussions informelles, en ont tiré vendredi "un bilan globalement très positif" et ont salué l'atmosphère constructive de cette conférence en vue de préparer la conférence mondiale sur le climat de Cancun.
    Selon Moritz Leuenberger, "nous avons discuté ouvertement, souvent exploré d'autres pistes que celles envisagées traditionnellement dans les négociations, réfléchi ensemble et ainsi amélioré notre compréhension des problèmes et des solutions possibles".
    Le ministre suisse a affirmé qu'il règne un consensus sur la n écessité d'un fonds pour le financement à long terme dans le domaine du climat. Il a qualifié la conférence de "réussite parce que des idées nouvelles y ont été discutées et que les ministres présents ont travaillé ensemble dans un climat de confiance mutuelle". Selon Moritz Leuenberger cette confiance était amoindrie après la conférence sur le climat de Copenhague, elle doit aujourd'hui être restaurée.
    Pour Patricia Espinosa, qui présidera la prochaine conférence mondiale sur le climat à Cancun, cette rencontre informelle est un jalon important pour préparer Cancun. Le Dialogue sur le climat a clairement montré l'importance d'une solution de financement acceptable. Elle a déclaré que "le financement est l'une des questions-clés pour trouver une solution dans le domaine du climat".
    La secrétaire générale de la Convention climat des Nations Unies Christiana Figueres qui a participé au Dialogue sur le climat a souligné que la question du financement est l'un des principaux volets des négociations internationales sur le climat. Selon elle, le Dialogue sur le climat de Genève a démontré que la transparence sera un élément décisif afin de rétablir la confiance dans la politique climatique internationale après la conférence de Copenhague.
    La Suisse et le Mexique ont organisé cette rencontre informelle à Genève en marge des négociations formelles sur le climat pour débattre de questions-clés relatives au financement climatique et pour rétablir la confiance après la conférence mondiale sur le climat de Copenhague. Le but de la rencontre de Genève sur le climat était de faciliter le dialogue et non de prendre des décisions. Des délégués de 46 pays représentatifs ont pris part aux discussions. 20 pays étaient représentés au niveau ministériel.


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  • L’ONU rechigne à verser les crédits carbone aux destructeurs de HFC23. Ceux-ci sont soupçonnés de produire trop de ce gaz à effet de serre. Pour toucher plus ?

    Le débat sur les gaz réfrigérants a pris, cet été,des airs d’affaire Dreyfus de la finance carbone. Inclure la destruction de ces gaz industriels dans le mécanisme de développement propre (MDP)est de plus en plus contesté. Le fait n’est pas nouveau. Depuis 2006, des ONG s’interrogent sur l’opportunité d’assurer des crédits à ces projets. La manne financière que représentent ces crédits produit un effet d’aubaine : les chimistes se voient incités à produire des gaz réfrigérants, non pas pour les vendre, mais pour récupérer des crédits CER dans l’opération. Mais cette fois, l’ONU, via le bureau exécutif du MDP (BEMDP), a interrompu les livraisons de crédits pour obtenir de plus amples informations. La Banque Mondiale, qui investit dans de tels projets et le lobby de la finance carbone, l’IETA, se sont rapidement insurgés contre cette décision, alors que les ONG estiment avoir gagné une manche.
    Produire pour détruire
    « Il y a des preuves évidentes que les industriels produisent des HFC-23 simplement pour les détruire et gagner des crédits CER », selon Mark Roberts, de l’Environmental Investigation Agency, une ONG sur l’environnement qui bataille sur ce sujet depuis plusieurs années. L’association, à laquelle d’autres se sont jointes (Sandbag, par exemple), souhaite que le MDP « élimine les motivations financières perverses qui encouragent la production de gaz réfrigérant».
    Le GES qui monte
    L’EIA s’appuie sur une étude de chercheurs américains parue, début 2010, dans Geophysical Research Letters (Recent Increases in HFC-23 emissions, Montzka et alii). Les chercheurs y ont analysé la concentration dans l’atmosphère de gaz réfrigérants. Ils en concluent que la présence de HFC 23 a progressé ces dernières années, et lient le phénomène au MDP. Mais l’étude s’appuie sur des données empiriques, puisqu’il s’agit de relevés réalisés entre 2000 et 2009 lors d’excursions dans l’Antarctique. « Le problème, c’est que l’on manque de données
    fiables sur le marché des gaz réfrigérants », assure un expert du marché du CO2. Et de fait, les statistiques sur les quantités de gaz produites et leurs prix de vente ont tendance à rester confidentielles.
    Selon la rumeur, les prix se seraient effondrés en 2009 – ce qui est le cas de toutes les matières premières. Fin août, le BEMDP a donc demandé à cinq producteurs dudit gaz de fournir 10 ans d’historique de leurs statistiques de production, sur l’évolution de l’offre, de la demande et des tarifs de vente. Parmi ces 5 chimistes sur les 19 producteurs de gaz réfrigérant qui reçoivent actuellement des crédits CER, on retrouve surtout des groupes chinois, mais aussi des occidentaux comme BP, qui n’en est plus à une catastrophe environnementale près... Mais selon une source proche du BECDM, il est probable que les 19 producteurs de gaz réfrigérant concernés passent à leur tour à la question. Ce qui permettrait d’avoir enfin une vue d’ensemble du marché.
    *http://www.agu.org/journals/gl/gl1002/2009GL 041195/2009GL041195.pdf


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  •  

    Infos climat

    http://www.350.org/fr


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